J'accuse, drame de Roman Polanski, France, 2019, 2.12h., avec Jean Dujardin, Louis Garrel, Emmanuelle Seigner, Mathieui Almaric, Grégory Gadebois et Melvil Poupaud.
L'affaire Dreyfus revisitée du point de vue du colonel Picquart qui cherche la vérité. La cour de l'hôtel des Invalides donne la dimension du drame. Les soldats sont placés tout autour et attendent l'arrivée de l'accusé. Des pas raisonnent et Dreyfus avance dans son uniforme et ses grades. Il est peu à peu défait de ce qui représentait à ses yeux le mérite militaire mais aussi l'inscription dans la société française, son intégration. L'humiliation qu'il subit est le résultat d'un antisémitisme virulent qui se développait à l'époque, à la suite des écrits empoisonnés datant de 1865 "La France juive" , des pamplets sur le complot judéo-maçonnique qui avait fabriqué la République, des Protocoles des sages de Sion, etc, on dirait aujourd'hui des fake news. Mais aussi de toute cette empreinte de conquête coloniale qui renforçait l'idée de supériorité des uns sur les autres. Et qui était aussi la Belle époque, des villes illuminées par l'électricité, de la montée de la grande et de la petite bourgeoisie, des grands magasins, de la consommation, des voyages, des bains de mer. Une époque qui découvrait le monde. Et dans tout cela, des vieux démons entachaient la société qui ne pensait qu'à prendre sa revanche après la défaite de Sedan et l'abolition de la monarchie. La mise en place de réseaux d'espionnage date de Napoléon, mais a pris une ampleur considérable avec l'avènement de la France industrielle, des voyages en trains, en somme de la rapidité, du téléphone, de l'invention de la voiture, du début de l'usage de la bicyclette. Les pays ennemis s'observaient. Entre l'Allemagne et la France, des comptes étaient à régler. Des courriers compromettant furent imputés à Dreyfus, on ne sait pourquoi au juste. Parce qu'il était juif, tout simplement, ou est-ce que c'était plus compliqué ? Le colonel Picquart est muté au service du renseignement où il succède à celui qui a dénoncé Dreyfus. Le service est aux mains d'anciens complices de malversations diverses qui ne sortent les pièces d'archives qu'au compte gouttes, le dossier Dreyfus n'a que trois feuillets comme preuve de sa trahison. C'est un peu léger au vu de la condamnation à l'île du Diable où il est soumis à diverses humiliations comme celle d'être maintenu aux pieds par des fers pour passer la nuit, de ne parler à personne, même pas aux gardiens, etc, de se nourrir comme il peut. Terrible punition pour celui qui n'a jamais livré de documents français à l'nnemi. Le colonel Picquart ne croit pas à la culpabilité de Dreyfus : il fut son professeur à l'école militaire et connaît l'homme. Et il va démontrer durant tout le film qu'il n'est pas coupable et le réhabilite dans son grade. Picquart entre temps était parti de l'armée et à la fin du film, on le voit en tant que ministre recevoir Dreyfus qui lui réclame un avancement.
Superbe film d'un véritable artiste qu'est Roman Polanski.